
Droit des robots : de la fiction à la réalité et de la réalité à l’impasse ?
Juridique - Droit Par Jean Vilanova le 08-02-2017La robotique est partout présente aujourd’hui. Dans le domaine des soins, le robot occupe une place immense dont il faut se réjouir car s’ouvrent ainsi de prometteuses perspectives dans la lutte contre les maladies.
Cependant, tout à la ruée technologique, prenons garde à ne pas déposséder le soignant de son art.

Photo : Geoffrey Le Guilcher / www.lesinrocks.com
Le volet intellectuellement introspectif propre au soin, sa dimension humaniste, le dialogue avec le patient, le partage avec lui du secret, la recherche de son consentement, aucun robot aussi « intelligent » soit-il ne pourra jamais assumer de telles missions pourtant si essentielles et sans lesquelles la médecine ne serait qu’une technique et le patient une entité découpée en tranches numérisées* !
Il existe aujourd’hui des robots « intelligents » nous dit-on. Ils sont dotés d’une intelligence artificielle qui leur confère une réelle autonomie en rapport avec un environnement donné comme par exemple l’assistance aux personnes âgées ou handicapées, en attendant d’autres fonctions dans d’autres domaines.
Voilà qui ne pouvait laisser de marbre les juristes !
Du constat de l’autonomie du robot (dans des limites programmée par le roboticien tout de même) à la consécration du statut de personne morale, il n’y a qu’un pas que beaucoup parmi eux ont déjà franchi. Ils en appellent même à « un droit des robots ».
Est-ce aller trop vite ou trop loin ? La question mérite débat.
Explications en trois temps…
1er temps… Le robot acquiert un espace d’autonomie de plus en plus vaste pouvant aller, pourquoi pas jusqu’à son émancipation de la directive du concepteur. Dans une telle optique, le statut de personnalité morale évoqué plus haut n’a plus rien d’aberrant.
2ème temps… Qui dit personnalité morale dit aussi identité juridique. Le robot sort alors de son simple état d’automate et dispose d’une capacité de plus en plus élevée à collaborer avec l’homme.
3ème temps… A ce stade, on en arrive immanquablement à la question de la responsabilité dans la mesure où son autonomie oriente le robot vers tel ou tel choix. Si ce choix s’avère erroné et occasionne un préjudice à autrui (un patient ou tout autre) est-il responsable ?
Certes non car la responsabilité repose sur la capacité de discernement de l’auteur du dommage et puisque l’intelligence du robot ne va pas jusque-là c’est donc qu’il n’est pas intelligent ! L’intelligence est un tout, elle se situe ailleurs. Le choix hasardeux des mots conduit les juristes (et quelques autres…) à une impasse.
En conclusion (très provisoire…)
Construire un droit sui generis, en d’autres termes propre à « l’espèce robot » nous semble une tâche des plus anachroniques. Il n’y a pas « d’espèce robot ». Le robot reste un outil au service de l’homme.
Pourtant, des réflexions sont engagées, des recherches entreprises** visant à inventer ce fameux droit des robots… Une quête possiblement bien incertaine selon nous.
* Newsletter La Médicale ; juin 2015. De la nécessité de piloter les progrès de la robotique au service du soignant
** Droit de la robotique – Libre blanc. SYMOP
Voir également la Semaine Juridique du 19 décembre 2016 ; n° 51, page 2403. 3 questions à Alain Bensoussan, avocat à la cour : « Le temps est venu de créer un droit des robots les dotant d’une personnalité et d’une identité juridique »
Cet article a été rédigé par Jean Vilanova pour La Médicale.