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L’intervention minimalement invasive : la bonne attitude à adopter

le 17-03-2025

 

 

L’intervention minimale en cariologie vise à limiter au maximum les dommages causés aux tissus dentaires (tissus durs, émail, dentine et pulpe) lors des préparations cavitaires. Ce concept inclut également et surtout la gestion des causes de la maladie carieuse.

 

Introduit à la fin des années 1980(1, 2), l’intervention minimale repose sur quatre axes principaux :
Prévention.
Reminéralisation.
Dentisterie restauratrice invasive a minima.
Réparation des restaurations défectueuses plutôt que leur remplacement complet.
Ces principes, lorsqu’ils sont combinés, permettent une approche moins invasive de la santé bucco-dentaire. Il est essentiel de limiter les interventions au strict minimum afin de laisser les stratégies préventives produire leurs effets.

 

« Il est absolument nécessaire de limiter les interventions au strict minimum et de laisser les stratégies préventives montrer leurs résultats en matière de prévention. »(3)

 

Les causes de la maladie carieuse

La maladie carieuse dépend uniquement de deux facteurs : la présence de bactéries cariogènes, notamment Streptococcus mutans et Lactobacillus acidophilus, et consommation de sucre. Cependant, d’autres éléments peuvent favoriser l’exposition à ces causes.
Par exemple, la présence de puits et sillons profonds peut faciliter l’accumulation de bactéries, tandis que certaines conditions particulières comme le handicap ou l’âge avancé peuvent exposer à la consommation de sucres. Une évaluation personnalisée du risque carieux est essentielle pour adapter les stratégies de prévention.

 

Un environnement oral favorable

Pour maintenir un environnement oral favorable, il est primordial de réduire l’apport de sucres entre les repas principaux, selon les recommandations de l’OMS, et d’adopter un brossage au minimum biquotidien pendant deux minutes avec un dentifrice fluoré, comme le préconise l’UFSBD.

 

L’utilisation de dispositifs spécifiques peut également améliorer le contrôle de la plaque dentaire.
La brosse à dents, qu’elle soit manuelle ou électrique, constitue un outil essentiel pour cette tâche. Les modèles soniques proposés par Philips Sonicare sont particulièrement efficaces, car leur utilisation est intuitive et ne requière pas l’apprentissage de techniques complexes, comme celle du rouleau.

D’autres outils, comme le fil dentaire et les brossettes interdentaires, sont aussi utiles, bien qu’ils puissent parfois être fastidieux ou délétères lorsqu’ils sont mal utilisés (brossettes au diamètre inapproprié ou trop usées). Les hydropulseurs, quant à eux, permettent un nettoyage interproximal doux et efficace, sans effets iatrogènes.

 

Dans des situations médicales particulières ou en présence d’un risque carieux extrême, le brossage biquotidien peut ne pas être suffisant pour garantir un environnement favorable vis-à-vis de la maladie carieuse. Il va falloir rajouter des mesures préventives.

Dans le cas des patients cancéreux, la chimiothérapie ou la radiothérapie, induisent une hyposialie (salive en faible quantité, très visqueuse qui peut être acide), un brossage biquotidien peut ne pas suffire. Il peut alors être nécessaire d’introduire des bains de bouche au bicarbonate de soude ou des antibactériens. Les hydropropulseurs doux sont également recommandés pour contrôler la plaque sans irriter les muqueuses fragiles.

 

Radio hygiène orale - Sophie DomejeanRadio hygiène oraleRadio hygiène orale implants
Fig. 01 : 3 cas cliniques qui illustrent que les patients ont passé du temps au cabinet dentaire (traitements endodontiques, restaurations et couronnes) et pourtant l’état bucco-dentaire est très mauvais. En effet, ne pas gérer les causes de la maladie carieuse conduit aux mêmes effets… L’hygiène alimentaire et l’hygiène bucco-dentaire sont la clef du succès !

 

Les différents niveaux de prévention pour une bonne hygiène orale

L’OMS définit trois niveaux de prévention en cariologie :
La prévention primaire, qui regroupe l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire l’apparition de maladies carieuses. Cela inclut notamment la limitation des sucres et l’utilisation de dentifrices fluorés.
La prévention secondaire, qui se concentre sur le traitement des premières lésions carieuses non cavitaires. Ces lésions peuvent être reminéralisées par une bonne hygiène orale et un apport adéquat en fluor.
La prévention tertiaire, qui intervient après la survenue de la maladie et vise à minimiser les complications par des soins restaurateurs appropriés.

 

Il existe également un quatrième niveau initialement décrit en médecine générale, appelé prévention quaternaire. En dentisterie, ce concept vise à éviter le surtraitement et à retarder le recours à des soins invasifs grâce notamment à une hygiène orale optimale. En cariologie en particulier, la prévention quaternaire ambitionne la préservation tissulaire en retardant le seuil restaurateur autant que possible.

 


 

Cette vidéo vous est proposée par Philips Sonicare.

 

Références bibliographiques

(1) AS. Dawson, OF. Makinson – Dental treatment and dental health. Part 1. A review of studies in support of a philosophy of Minimum Intervention Dentistry.

(2) AS. Dawson, OF. Makinson – Dental treatment and dental health. Part 2. An alternative philosophy and some new treatment modalities in operative dentistry.

(3) A. Sheiham, OF. Makinson – Minimal intervention in dental care.
Department of Epidemiology and Public Health, University College, London UK.

L’amalgame : bel et bien du passé ?

le 09-09-2024

L’amalgame dentaire au mercure

Durant environ un siècle, l’amalgame dentaire a été le matériau de restauration standard pour les lésions carieuses postérieures. Compte tenu de sa facilité de mise en place, en particulier de sa tolérance à l’humidité, mais aussi de sa résistance relativement élevée aux forces masticatoires et aux caries secondaires, l’amalgame est encore aujourd’hui la norme des matériaux de restauration dans la plupart des assurances maladie obligatoires ou publiques.
Alors que les inquiétudes quant à sa biocompatibilité et à ses effets plus généraux sur la santé ont à maintes reprises soulevés des controverses ouvertes, un certain nombre d’études ont démenti ces supputations et démontré la sécurité générale de l’amalgame s’il est correctement mis en place.

 

Toutefois, en vertu de la convention de Minamata, l’utilisation de l’amalgame devrait cesser dans de nombreux pays du monde au cours des prochaines années. Cette convention, qui prévoit la limitation et, tôt ou tard, l’interdiction du mercure dans tout processus industriel, a été adoptée par la grande majorité des pays en réponse aux rejets de mercure émanant d’un processus industriel dans la ville de Minamata au Japon et à une série d’effets sanitaires généralisés dus à l’absorption consécutive de mercure par des milliers de personnes.

 

À cet égard, le secteur dentaire est un cas particulier ; la convention ne lui a pas imposé un « retrait » total du matériau, mais une « réduction progressive ».
Les pays signataires se sont engagés à prendre des mesures pour diminuer l’utilisation des amalgames dentaires, notamment en renforçant la prévention ou le développement et l’adoption d’autres stratégies de restauration. Dans de nombreux pays du monde, dont ceux de l’Union européenne, les décideurs politiques ont même résolu de dépasser cet engagement et de retirer complètement l’amalgame des produits dentaires. Pour certains groupes, c’est-à-dire les femmes enceintes ou qui allaitent, ce retrait s’est déjà concrétisé.

 

Dans ce contexte, les chirurgiens-dentistes font maintenant face à une question importante : quel autre matériau utiliser ?

 

Possibilités de restauration dans l’ère de l’après-amalgame

Au cours des 60 dernières années, une série de matériaux ont été proposés en remplacement de l’amalgame.
Globalement, ils se répartissent en trois catégories :
Résines composites, mises en place graduellement afin de compenser la rétraction due à la polymérisation et permettre une prise efficace ;
Matériaux à base de verre, c’est-à-dire verres ionomères et verres hybrides ;
Matériaux combinant les propriétés des deux classes de matériaux précités (pour ces derniers, la terminologie manque d’uniformité et les données cliniques sont souvent limitées).

 

Résines composites

Les résines composites ont particulièrement une longue tradition d’utilisation comme substituts de l’amalgame, notamment pour les restaurations postérieures soumises à des charges atteignant la face proximale.
Les résines composites micro et nanohybrides présentent d’excellentes propriétés physiques, telles qu’une grande résistance à l’abrasion et à l’érosion, une grande résistance à la flexion, une bonne aptitude au polissage et des qualités esthétiques.

 

En outre, ces matériaux peuvent être mis en place par une technique adhésive et ne requièrent donc pas de préparation cavitaire macrorétentive, ce qui permet des traitements dentaires minimalement invasifs.
La mise en place de résines composites est associée à un certain nombre d’exigences préalables, entre autres un contrôle strict de l’humidité, un protocole séquentiel de préparation et de conditionnement des cavités, nécessitant par exemple un mordançage à l’acide suivi de l’utilisation d’adhésifs.
Ces dernières années, les fabricants se sont efforcés de simplifier le processus, notamment en combinant les étapes de mordançage et d’application de l’adhésif, ou en diminuant le besoin d’une mise en place graduelle grâce à l’utilisation de composites d’obturation « en bloc ».

 

Néanmoins, la mise en place des résines composites – surtout dans la zone juxta gingivale ou sous-gingivale – est techniquement exigeante. De plus, le matériau lui-même est relativement coûteux par rapport à l’amalgame dentaire. Les résines composites peuvent donc certainement être considérées comme l’une des solutions contemporaines pour remplacer l’amalgame, mais elles « ne passent pas l’examen haut la main ».

 

Verres ionomères et verres hybrides

Pendant plusieurs décennies, les verres ionomères n’ont pas été considérés comme une formule de rechange entièrement équivalente de l’amalgame, principalement en raison de leur stabilité modérée contre l’abrasion ou l’érosion et de leur faible résistance à la flexion, qui réduisaient leur longévité dans les cavités postérieures occluso-proximales.

 

De nouvelles générations de ces matériaux à base de verre ont été conçues afin de pallier les principales faiblesses évoquées. Une classe plus perfectionnée de matériaux à base de verre, appelés verres hybrides, semble avoir surmonté la plupart des limitations quant à la stabilité à l’abrasion et à l’érosion, et présente également une résistance à la flexion nettement accrue.
Ce résultat est dû à une modification de la composition chimique du matériau, principalement l’introduction d’autres particules de verre, plus petites et hautement réactives, et de chaînes d’acide acrylique plus longues. En outre, l’ajout d’une étape de revêtement de la surface de verre plus rugueuse avec une résine nanochargée, appliquée sur les faces occlusales ou autres faces accessibles, protège le verre poreux contre les acides et l’abrasion.
Ce revêtement a également permis d’améliorer considérablement l’esthétique du matériau dont l’aptitude au polissage était jusqu’alors médiocre. Avec l’usure du revêtement, le verre hybride entre dans une phase de seconde maturation unique qui augmente sensiblement la dureté de la restauration(1).

 

Des études menées en laboratoire ont confirmé que les verres hybrides présentent en effet des propriétés largement supérieures à celles de leurs prédécesseurs, tout en conservant les avantages de cette classe de matériaux, notamment la possibilité d’une mise en place en bloc, la facilité de la mise en place et une excellente bioactivité (surtout la libération bien connue d’ions fluorure). Il ne faut cependant pas oublier que les études de laboratoire ne reflètent pas nécessairement le comportement clinique. Seules des études cliniques peuvent démontrer les effets réels de toute modification du matériau et l’aptitude potentielle d’un matériau de restauration à remplacer l’amalgame.

 

Verres hybrides : les données cliniques sont une monnaie forte

Comme avec la plupart des avancées scientifiques, le développement des verres hybrides n’a pas été une révolution, mais une évolution. Un bon nombre d’études, dont certaines sont même fondées sur la pratique, ont évalué les prédécesseurs directs des verres hybrides. Elles ont confirmé les progrès apportés à cette classe de matériaux au cours des quinze dernières années et réfuté le concept selon lequel les matériaux à base de verre sont simplement des matériaux temporaires(2, 4).

 

Les paragraphes suivants présentent plus en détail plusieurs études menées sur la génération actuelle de verres hybrides. Il est rassurant de constater que ces études ne sont pas toutes associées aux fabricants et ont été menées par plusieurs groupes dans le monde entier.
Elles reposent également sur différentes indications cliniques et utilisent des modèles cliniques robustes, notamment des études randomisées, pour comparer le verre hybride avec une norme de traitement acceptée, telle qu’une résine composite. Les deux grands domaines d’application examinés sont les lésions cervicales et les lésions postérieures soumises aux charges.

 

Lésions cervicales

La mise en place de verres ionomères dans la région cervicale, en particulier de verres ionomères modifiés par adjonction de résine, remonte à longtemps et s’appuie sur une multitude d’études cliniques démontrant l’utilité de ce matériau dans cette indication. En ce qui concerne le taux de survie et de réussite des restaurations cervicales, les verres ionomères modifiés par adjonction de résine ont toujours surpassé les autres matériaux(5).

 

lésion cervicale non carieuse, avant traitementFig. 01 : multiples lésions cervicales non carieuses, avant traitement.

restauration initiale par un verre hybrideFig. 02 : lésions cervicales restaurées avec le verre hybride EQUIA Forte (GC).

même restauration après 6,5 ansFig. 03 : restaurations en verre hybride lors du suivi après 6,5 ans (avec l’aimable autorisation du Pr. Matteo Basso, Italie).

 

Pour le verre hybride, il existe deux études randomisées qui ont comparé ce matériau à des résines composites.
La première(6) portait sur un petit échantillon de 25 patients présentant des lésions cervicales non carieuses et un bruxisme, c’est-à-dire un groupe très spécifique (composé dans l’ensemble de patients plutôt jeunes), dont 148 lésions ont été restaurées aléatoirement (ce qui indique un grand nombre de lésions par patient) avec un verre hybride (Equia Forte, GC, Tokyo, Japon) ou une résine composite (Ceram.x® One SphereTEC™ Universal, Dentsply, Konstanz, Allemagne).
Après 6, 12 et 24 mois de suivi, les restaurations ont été réévaluées selon les critères modifiés du Service de santé publique des États-Unis (USPHS). L’évaluation des 126 restaurations encore présentes (chez 22 patients) au suivi de 24 mois a fait état d’un comportement similaire des deux matériaux. Seule l’adaptation marginale a montré une différence significative et l’adaptation des verres hybrides était légèrement moins bonne. Aucune carie secondaire n’a été observée dans les restaurations.

 

Une autre étude(7), incluant un suivi de 36 mois, a évalué la survie, la qualité et les coûts des restaurations en verre hybride (Equia Forte, GC, Tokyo, Japon) et en résine composite (Filtek™ Supreme XTE, 3M™, Saint-Paul, États-Unis) pour la prise en charge des lésions cervicales, plus précisément des lésions cervicales scléreuses non carieuses.
Les restaurations ont été mises en place directement chez 88 patients (50 à 70 ans) présentant 175 lésions, sans aucune préparation mécanique (ce qui a finalement mené à des taux d’échec annuels importants dans les deux groupes, voir ci-dessous).
La qualité des restaurations a été évaluée après 1, 18 et 36 mois selon les critères de la Fédération Dentaire Internationale (FDI). Les coûts ont été évalués à l’aide d’une approche reposant sur le microcosting (comptabilisation du temps utilisé pour la mise en place du matériau) et, pendant le suivi, sur les prestations de l’assurance obligatoire en Allemagne.

Sur les 88 patients, 43 ont été traités par des verres hybrides (83 restaurations) et 45 par des résines composites (92 restaurations) ; le plan de l’étude reposait sur une randomisation par grappes. Après 36 mois, 17 verres hybrides et 19 résines composites présentaient une perte totale de rétention, 5 verres hybrides étaient partiellement perdus (aucune différence significative entre les matériaux).
Aucun des domaines évalués selon les critères de la FDI ne présentait des scores significativement différents, à l’exception du brillant de surface (dans ce cas, les composites étaient supérieurs aux verres hybrides – bien qu’il convienne de noter que la dernière génération de verres hybrides vise spécifiquement ces effets esthétiques).
Les coûts liés aux verres hybrides étaient nettement inférieurs, tant au départ (verres hybrides : 32,57 € ; écart type (σ) 16,36 par rapport aux résines composites : 44,25 € ; σ 21,40) et sur toute la période d’observation (verres hybrides : 41,72 € ; σ 25,08 par rapport aux résines composites : 51,60 € ; σ 26,17).

 

En résumé, les deux études – randomisées et de conception robuste – démontrent que les verres hybrides conviennent parfaitement à la restauration des lésions cervicales. Elles prouvent également que le taux de survie du matériau n’est pas seulement similaire à celui d’une résine composite, mais que le rapport coût-efficacité est avantageux. Comme mentionné ci-dessus, le bon comportement des verres ionomères dans cette indication n’est pas un fait forcément nouveau.
Toutefois, les aspects liés aux différences économiques entre les composites et les verres hybrides pour la prise en charge des lésions cervicales n’ont pas encore fait l’objet d’une évaluation approfondie. Quel que soit le matériau de restauration utilisé, il convient également de souligner qu’une préparation des surfaces sclérosées est probablement bénéfique.

 

Lésions occluso-proximales

Contrairement aux lésions cervicales, les verres ionomères n’étaient auparavant pas tenus pour une solution de restauration des cavités postérieures soumises aux charges qui s’étendaient aux faces proximales. Comme indiqué plus haut, leur faible résistance à la flexion et à l’abrasion/l’érosion compromettait souvent la réussite et la survie des restaurations en verre ionomère utilisées pour cette indication. À l’inverse, un certain nombre d’études cliniques ont démenti ce jugement en ce qui concerne les verres hybrides.

 

Deux études randomisées menées récemment sont particulièrement remarquables :
La première(8) a comparé un verre hybride (Equia Forte, GC, Tokyo, Japon), une résine composite d’obturation en bloc (Filtek™ One Bulk Fill Restauration Postérieure, 3M™, Saint-Paul, États-Unis) et une résine composite microhybride mise en place graduellement (Charisma Smart, Heraeus Kulzer, Hanau, Allemagne).
Les matériaux ont été utilisés pour restaurer aléatoirement 109 dents permanentes présentant des cavités siégeant sur deux faces (mésio-occlusales, disto-occlusales) chez 54 patients relativement jeunes (31 femmes et 23 hommes d’un âge moyen de 22 ans). Les restaurations ne s’étendaient pas vers les cuspides et toutes les limites cervicales se situaient dans l’émail sain (c’est-à-dire, en dehors de la région sous-gingivale). Les matériaux ont été mis en place après l’élimination des caries et une préparation minimalement invasive.

Au bout d’une période maximale de 24 mois, 84 restaurations ont été réévaluées selon les critères modifiés de l’USPHS. Par rapport au verre hybride, l’état des restaurations en composite était meilleur quant à la forme anatomique, les points de contact, la correspondance de teinte, la texture de surface et la survie globale.

 

Fig. 04 : restauration de classe I sur la dent 47 présentant des colorations marginales et des caries récurrentes, avant traitement.

Fig. 05 : restauration de classe I en verre hybride au moyen d’EQUIA Forte (GC), juste après la mise en place.

Fig. 06 : restauration en verre hybride lors du suivi, 3 ans après la mise en place (avec l’aimable autorisation du Pr. Matteo Basso, Italie).

 

En revanche, une autre étude internationale randomisée, utilisant un modèle sur bouche divisée(9, 10), menée dans quatre centres hospitaliers universitaires à Zagreb (Croatie), Belgrade (Serbie), Milan (Italie) et Izmir (Turquie), a comparé un verre hybride (Equia Forte, GC, Tokyo, Japon) à un composite nanohybride (Tetric EvoCeram®, Ivoclar Vivadent, Schaan, Liechtenstein) dans le cadre d’une indication similaire.
L’étude a évalué les restaurations siégeant sur les faces occluso-proximales de molaires permanentes de patients adultes ; chaque patient devait présenter deux cavités similaires dans les molaires pulpées (réponse positive au chlorure d’éthyle) de la même arcade afin de satisfaire au modèle sur bouche divisée.

 

Fig. 07 : restauration de classe II de la dent 26 présentant des caries secondaires.

Fig. 08 : restauration de classe II en verre hybride de la dent 26 au moyen d’EQUIA Forte (GC), juste après le traitement.

Fig. 09 : restaurations de classe II en verre hybride, 5 ans après le traitement (avec l’aimable autorisation du Pr. Matteo Basso, Italie).

 

Au total, 360 restaurations ont été mises en place chez 180 patients. Une dent de chaque patient a été choisie au hasard pour être restaurée avec un verre hybride et l’autre pour une restauration par un matériau composite.
Avant la mise en place des matériaux, des matrices sectionnelles à l’anatomie précontourées (Palodent® Plus, Dentsply Sirona) ont été posées et les cavités conditionnées conformément aux instructions du fabricant. Un adhésif automordançant à deux composants (Adhese Universal, Ivoclar Vivadent) a été utilisé pour le composite. Les patients et les restaurations ont été suivis et évalués après 1 semaine, 1 an, 2 ans et 3 ans, selon les critères FDI-2(10). Les coûts de chaque restauration assumés par les patients ont également été calculés en dollars américains (USD), tout en tenant compte des coûts médicaux directs. L’évaluation de la rentabilité reposait sur le calcul du rapport coût-efficacité différentiel, c’est-à-dire le rapport entre la différence de coût des deux restaurations et la différence exprimée en termes de résultats (gain ou perte d’efficacité).

 

Dans cette étude, les patients du centre italien étaient plus âgés que ceux des autres centres, et dans l’ensemble, les femmes étaient plus nombreuses que les hommes. Au cours des 3 années d’étude, 32 patients ont abandonné et 21 ont été retraités (27 restaurations). La durée moyenne de survie des restaurations était élevée dans tous les centres et ne différait pas considérablement entre les deux matériaux.

 

Fig. 10 : coûts et survie des verres hybrides et des composites dans les différents pays (moyenne, écart-type).

 

Dans trois des quatre pays, le composite était plus coûteux, tant initialement (par exemple pour sa mise en place) que sur le long terme (sur les trois années de suivi, compte tenu de la gestion des complications). Lors de l’évaluation du rapport coût-efficacité (en termes d’USD et de survie en mois), le composite était généralement plus onéreux que les verres hybrides dans trois des quatre pays, et le coût du composite était globalement plus élevé par rapport au bénéfice clinique limité (surcoût de 268,5 USD par mois supplémentaire sans complications).

 

Les dernières données probantes montrent que les verres hybrides sont également prometteurs pour les cavités postérieures atteignant les faces proximales. Bien qu’il existe certaines incohérences entre les
deux études précitées quant à la longévité comparative des verres hybrides et des composites utilisés à cette fin, leurs résultats sont encourageants, en particulier ceux de la vaste étude internationale.
Les quatre centres indépendants ont obtenu des résultats concordants qui ont confirmé la pertinence des composites et des verres hybrides pour les cavités soumises aux charges tout au long de la période d’observation de 3 années.

 

Le rapport coût-efficacité favorable des verres hybrides a notamment été reconfirmé, ce qui fait de ces matériaux une solution particulièrement intéressante pour remplacer l’amalgame lorsque l’aspect financier est un élément important, par exemple dans les pays à revenu faible ou moyen, mais aussi dans le cadre de la plupart des assurances obligatoires ou sociales dans les régions à revenu élevé.
Un modèle d’extrapolation(11) a permis de démontrer le maintien probable de ce rapport coût-efficacité sur le long terme ; selon une étude menée récemment, les composites sont à peine plus efficaces (rétention des dents pendant une durée moyenne de 54,4 ans, avec un écart-type (σ) de 1,7 an) que les verres hybrides, et sont aussi plus onéreux (694 euros, σ 54 euros). Dans les analyses de sensibilité, et sous certaines hypothèses, les verres hybrides se sont même avérés plus efficaces tout en restant moins coûteux que les composites.

 

Les verres ionomères qualifiés de médicaments essentiels

Compte tenu des avantages des verres ionomères et des verres hybrides ainsi que des progrès récents, un comité d’experts de l’OMS a déclaré en 2021 que « les propriétés anticariogènes du ciment verre ionomère découlent de la capture et de la libération continues d’ions fluorure, qui reminéralisent les structures dentaires carieuses et ont un effet bactériostatique.
Le ciment verre ionomère réduit les taux de caries récurrentes par rapport aux restaurations en composite ou en amalgame, et réduit également l’incidence de nouvelles caries sur les autres dents. Grâce à la simplicité d’application, le ciment verre ionomère est adapté aux soins de santé primaires et aux interventions sur le terrain, y compris pour les « personnes ayant des besoins spéciaux »(12).

 


Fig. 10 : cavité de classe I avant le traitement.


Fig. 11 : restauration en verre hybride au moyen d’EQUIA Forte HT (GC) (avec l’aimable autorisation du Dr Zeynep Bilge Kütük, Turquie).

 

En conséquence, le verre ionomère est le seul matériau parmi quelques matériaux dentaires qui peut être défini comme « médicament essentiel »(13), c’est-à-dire un matériau indispensable à un système de soins de santé de base. Les médicaments essentiels sont généralement les produits les plus efficaces, les plus sûrs et les plus rentables pour une pathologie donnée (dans ce cas, les caries dentaires).
En 2019, les verres hybrides ont été reconnus par la FDI comme une classe de matériaux de restauration des dents permanentes, adaptés aux restaurations intéressant une seule face et aux restaurations de classe II(14, 15).

 

Conclusion

L’ère de l’amalgame dentaire touche lentement à sa fin, et on peut s’attendre au retrait total de l’amalgame dans la plupart des futurs systèmes de soins de santé. Il n’existe aucun matériau qui réponde à toutes les conditions requises pour remplacer l’amalgame ; par contre, on dispose d’une gamme de matériaux aux propriétés différentes et les chirurgiens-dentistes devront choisir en connaissance de cause le matériau le
mieux adapté à chaque indication. Les verres ionomères et les verres hybrides sont des substituts potentiels de l’amalgame et ont évolué considérablement au cours des vingt dernières années.

Les données sont à l’appui de l’utilisation de verres hybrides pour les restaurations cervicales et postérieures soumises à des charges. Le rapport coût-efficacité et la pertinence de ces matériaux sont probablement supérieurs à ceux d’autres matériaux, mais une amélioration des autres caractéristiques (en particulier la résistance à la flexion) serait un progrès souhaitable pour faire de ces matériaux un substitut véritablement universel de l’amalgame.

Néanmoins, selon l’OMS, les verres ionomères et les verres hybrides sont déjà des « médicaments essentiels » pour la plupart des systèmes de soins de santé dans le monde.

 


 

Cet article vous est proposé par GC.

GC

 

 

Références bibliographiques

(1) Y. Shimada, Y. Hokii, K. Yamamoto et al – Evaluation of hardness increase of GIC restorative surface in saliva.
Clin Oral Invest (2015) 19:1701–1754.

(2) S. Gurgan, Z-B. Kutuk, E. Ergin, S-S. Oztas, F-Y. Cakir – Clinical performance of a glass ionomer restorative system: a 6-year evaluation.
Clin Oral Investig. 2017;21(7):2335-43.

(3) T. Klinke, A. Daboul, A. Turek, R. Frankenberger, R. Hickel, R. Biffar – Clinical performance during 48 months of two current glass ionomer restorative systems with coatings: a randomized clinical trial in the field.
Trials. 2016;17(1):239.

(4) K. Friedl, K-A. Hiller, K-H. Friedl – Clinical performance of a new glass ionomer based restoration system: a retrospective cohort study.
Dent Mater. 2011;27(10):1031-7.

(5) F. Schwendicke, G. Gostemeyer, U. Blunck, S. Paris, L-Y. Hsu, Y-K. Tu – Directly placed restorative materials: review and network meta-analysis.
J Dent Res. 2016;95(6):613-22.

(6) Koc Vural U, Meral E, Ergin E, Gurgan S – Twenty-four-month clinical performance of a glass hybrid restorative in non-carious cervical lesions of patients with bruxism: a split-mouth, randomized clinical trial.
Clin Oral Investig. 2020;24(3):1229-1238.

(7) Schwendicke F, Müller A, Seifert T, Jeggle-Engbert LM, Paris S, Göstemeyer G – Glass hybrid versus composite for non-carious cervical lesions: Survival, restoration quality and costs in randomized controlled trial after 3 years.
J Dent. 2021; 110:103689.

(8) H. Balkaya, S. Arslan – A two-year clinical comparison of three different restorative materials in class II cavities.
Oper Dent. 2020;45(1):e32-e42.

(9) F. Schwendicke, J-G. Rossi, J. Krois, M. Basso, T. Peric, L-S. Turkun et alCost-effectiveness of glass hybrid versus composite in a multi-country randomized trial. J Dent.
J Dent. 2021;107:103614.

(10) I. Miletić, A. Baraba, M. Basso, M-G. Pulcini, D. Marković, T. Perić et alClinical performance of a glass-hybrid system compared with a resin composite in the posterior region: results of a 2-year multicenter study.
J Adhes Dent. 2020;22(3):235-47.

(11) F. Schwendicke, M. Basso, D. Markovic, L-S. Turkun, I. Miletić – Long-term cost- effectiveness of glass hybrid versus composite in permanent molars.
J Dent.2021;112:103751.

(12) Expert Committee on Selection and Use of Essential MedicinesGlass ionomer cement – dental caries.
Accessed Sept 16, 2022.

(13) Expert Committee on Selection and Use of Essential MedicinesWHO.
Accessed Sept 16, 2022.

(14) FDI World Dental Federation, 2019Carious lesions and first restorative treatment.
Accessed Sept 14, 2022.

(15) FDI World Dental Federation Carious lesions and first restorative treatment: adopted by the general Assembly: September 2019, San Francisco, United States of America.
Int Dent. J. 2020; 70: 5–6.

Caries radiculaires : difficultés et recommandations pour la pratique

le 11-03-2024

Caries radiculaires

La carie est l’affection la plus courante chez l’être humain ; presque tout le monde en est atteint un jour ou l’autre dans sa vie. On estime aujourd’hui que le facteur déterminant n’est pas la simple présence ou la quantité du biofilm, mais plutôt les conditions environnementales.
Normalement, le biofilm dentaire est non cariogène, car les bactéries qui tolèrent l’acide et en produisent n’y sont présentes qu’en très petit nombre. Seul l’apport d’hydrates de carbone permet à ces bactéries de produire de l’acide et d’abaisser le PH, menant au déplacement d’autres bactéries physiologiques et à la création d’une niche écologique.
En cas d’apport régulier d’hydrates de carbone, le biofilm se modifie durablement et c’est ce biofilm modifié, et lui seul, qui est capable de produire des quantités suffisantes d’acide pour provoquer une déminéralisation marquée des tissus dentaires durs(1). La déminéralisation n’est évidemment pas le but visé par les bactéries, mais plutôt un effet secondaire indirect.

 

Les racines exposées sont prédisposées au risque carieuxFig. 01 : les racines exposées sont prédisposées au risque carieux ; elles se déminéralisent plus tôt et plus rapidement, car la dentine ou le cément n’est pas protégé par l’émail ou l’alvéole.

 

Sachant cela, il est compréhensible que la pathogénicité du biofilm ainsi que l’équilibre entre la déminéralisation et la reminéralisation puissent être modifiés. Aujourd’hui, on accorde donc plus d’importance non pas au traitement de restauration, mais à la prévention des caries ou à l’arrêt des lésions existantes par un contrôle mécanique ou chimique du biofilm, un régime alimentaire adéquat ou une surveillance de la déminéralisation et de la reminéralisation. Un certain nombre de cas ont cependant toujours besoin d’un traitement de restauration, pour lequel différentes approches sont possibles(2).

 

Difficultés posées par les caries radiculaires

La mise en œuvre de mesures préventives a contribué à une réduction manifeste des caries chez les enfants et les adolescents(3). En Allemagne, un enfant de 12 ans n’a en moyenne que 0,5 dent cariée ou obturée, soit une diminution de près de 90 % depuis les années 1970 ! Cette réussite est néanmoins assombrie par certaines constatations.

Tout d’abord, malgré ces mesures, il subsiste un petit groupe de patients où le taux de caries reste élevé. Ensuite, la population plus âgée présente d’autres formes de caries plus notables, telles que les caries secondaires et/ou radiculaires. Celles-ci sont le sujet de cet article. Ces caries se développent sur les surfaces radiculaires exposées où l’élimination du biofilm est limitée, soit en raison d’un accès difficile, soit en raison d’une hygiène bucco-dentaire générale insuffisante.

 

mise en place des résines composites est techniquement plus exigeante
Fig. 02 : malgré leurs excellentes propriétés, la mise en place des résines composites est techniquement plus exigeante. Avec l’aimable autorisation du Pr B. Van Meerbeek, Université catholique (KU) de Louvain – BIOMAT, Belgique.

 

Les surfaces radiculaires exposées sont également plus prédisposées aux caries en raison de leur composition (dentine ou cément exposés) et se déminéralisent plus tôt et plus rapidement. Outre la déminéralisation causée par les acides, la matrice organique de la dentine est dissoute par des enzymes bactériennes et spécifiques à ce tissu. La dissolution du collagène dentinaire accélère la destruction et, à un certain degré de dissolution, la dentine n’est plus capable de se reminéraliser.

 

La morphologie des caries radiculaires est également différente de celle des caries de l’émail :
• Les lésions carieuses ont souvent une forme de bol et peuvent théoriquement être nettoyées.
• Elles ne sont pas rétentives ; le traitement de restauration nécessite souvent l’utilisation de matériaux adhésifs, mais la proximité de la gencive pose des difficultés quant au contrôle de l’humidité et de la mise en place d’une matrice.

 

une lésion cervicale est restaurée au moyen d’un verre hybrideFig. 03 : une lésion cervicale est restaurée au moyen d’un verre hybride. a) Mise en place d’EQUIA Forte HT ; b) EQUIA Forte Coat crée une surface lisse ; c) Restauration après la finition (avec l’aimable autorisation de J. Tapia Guadix, Espagne).

 

Les caries radiculaires sont les caries de l’âge et se développent principalement lorsque les surfaces radiculaires sont exposées (souvent à la suite d’une perte osseuse parodontale)(4). Les caries radiculaires touchent donc surtout les populations vieillissantes où de plus en plus de personnes âgées conservent un nombre important de leurs dents naturelles.
Les résultats des études allemandes sur la santé bucco-dentaire le confirment : le nombre de surfaces radiculaires cariées par personne dans la population est passé de 0,27 en 1997 à 0,71 en 2005 puis à 0,91 en 2014. Si l’on tient compte du développement et des changements démographiques, on peut en déduire que le nombre total de surfaces radiculaires cariées a triplé en l’espace de 20 ans seulement, passant d’environ 21 millions à plus de 70 millions(4).
Les caries radiculaires pourraient ainsi devenir la forme la plus courante de lésions carieuses dans de nombreux pays à haut revenu, où les personnes âgées, dont le nombre de dents naturelles encore présentes est plus élevé qu’auparavant, représentent le seul groupe d’âge en croissance.

 

Facteurs de risque

Comme expliqué précédemment, le risque de carie radiculaire augmente fortement avec l’âge. Il est donc probable que les facteurs de risque associés aux changements liés à l’âge contribuent également au développement des caries radiculaires.
Des antécédents de caries radiculaires sont le facteur de risque le plus souvent identifié(5) et sont généralement un bon indicateur, car ils englobent rétrospectivement tous les autres facteurs (comportement, génétique, anatomie, physiologie, etc.). Ces facteurs étant immuables ou rarement modifiés, on estime que cette trajectoire suivie par le passé se poursuivra à l’avenir.

D’autres facteurs de risque pertinents sont le nombre de surfaces radiculaires exposées, une hygiène bucco-dentaire insuffisante ou la présence d’une parodontite. Le nombre de surfaces radiculaires exposées et la parodontite sont souvent liés, comme nous le verrons en détail par la suite. Toutefois, les données sur les facteurs de risque de carie radiculaire sont limitées et ne reposent que sur un petit nombre d’études fiables.

 

Les faits permettent de déduire que les patients qui présentent déjà une ou plusieurs caries radiculaires sont exposés à un risque plus élevé d’en développer de nouvelles. Outre les mesures de routine, des stratégies de prévention, une surveillance étroite et une intervention précoce dès l’apparition de nouvelles lésions carieuses radiculaires sont donc recommandées chez ces patients.

 

Prise en charge des caries radiculaires

Il existe un ensemble de mesures préventives et thérapeutiques pour les caries, dont l’efficacité est prouvée chez les enfants et les adultes. Toutefois, peu d’études valables ont été menées sur les approches du traitement des caries radiculaires chez les patients plus âgés. Une analyse systématique récemment publiée a fourni un résumé des données sur les différentes stratégies de prévention et de traitement des caries radiculaires(6).

 

Cette analyse est à la base d’un document de consensus élaboré par des délégués de divers organismes professionnels (Organisation européenne pour la recherche sur les caries (ORCA), Fédération européenne de dentisterie conservatrice (EFCD) et Société allemande de dentisterie conservatrice (DGZ)), dont l’objectif
était de fournir aux chirurgiens-dentistes des recommandations factuelles sur la prévention et le traitement(7), notamment :

• Le groupe des personnes âgées étant hétérogène sous divers aspects (par exemple, l’hygiène bucco-dentaire, la santé générale), il convient de tenir compte des besoins individuels de ces patients dans le processus de planification.

• Les soins dentaires de ces patients suivent souvent des approches pragmatiques visant à prolonger la survie des dents plutôt que des interventions plus complexes.

• Dans la mesure où l’état de santé des patients âgés peut évoluer rapidement, il est recommandé d’effectuer des examens à des intervalles réguliers.

• Dans les cas de patients très dépendants, il convient d’envisager l’extraction des dents.

• Bien qu’il ne soit pas toujours possible d’obtenir des résultats satisfaisants dans la pratique, il est important de maintenir une bonne hygiène bucco-dentaire chez les patients âgés. Des conditions orales saines sont particulièrement cruciales chez ces patients, car on sait que la santé bucco-dentaire et la santé systémique sont interconnectées. Par exemple, une mauvaise hygiène bucco-dentaire peut être à l’origine d’une pneumonie chez les patients dépendants.
Comme pour les patients plus jeunes, le but de la prévention des caries chez les patients âgés est d’agir sur les facteurs étiologiques qui interviennent dans le développement des caries. Par conséquent, les patients âgés présentant un risque carieux accru devraient réduire leur consommation de sucre et veiller à une application générale de fluorure par un brossage des dents avec un dentifrice fluoré deux fois par jour.

• En raison de la perte osseuse parodontale, les patients âgés présentent souvent des espaces interdentaires ouverts qui sont prédisposés aux lésions carieuses radiculaires. Ces patients doivent veiller à une hygiène de ces espaces au moyen de brossettes interdentaires et d’un dentifrice fluoré.

• Dans de nombreux cas, les déficiences liées à l’âge entraînent une diminution de l’efficacité des mesures d’hygiène bucco-dentaire que les patients âgés effectuent eux-mêmes, en particulier les patients dépendants, qui peuvent ne plus être du tout capables d’assumer ces gestes. Les soignants, dont les membres de la famille, doivent donc être encouragés à apporter leur soutien ou à assumer les mesures d’hygiène bucco-dentaire.

 

Il existe des traitements non invasifs pour les lésions carieuses radiculaires existantes. Ils ont pour but de faire passer les lésions actives (lésions molles, recouvertes de plaque) à un état inactif (lésions dures, exemptes de plaque). Ces lésions inactives doivent être considérées comme des « cicatrices » qui ne nécessitent pas de traitement supplémentaire.

En ce qui concerne les lésions facilement accessibles, une mesure simple et efficace consiste à les brosser consciencieusement dans le cadre de l’hygiène bucco-dentaire quotidienne. L’élimination régulière du biofilm cariogène permet de faire passer la lésion à un état inactif. Les patients à haut risque doivent se brosser les dents avec un dentifrice fortement fluoré (5000 ppm de fluorures). L’application de vernis fluoré ou de fluorure de diamine d’argent au cabinet dentaire est également recommandée pour le traitement des caries radiculaires, mais il convient toutefois de noter que le fluorure de diamine d’argent peut causer des colorations noires irréversibles sur les surfaces traitées.

 

Certaines lésions nécessitent cependant un traitement par une approche restauratrice qui est évoquée, ainsi que les différentes options de matériaux disponibles pour cette indication, dans la section suivante.

 

Difficultés rencontrées lors du traitement de restauration

Comme il a été expliqué, les lésions carieuses radiculaires diffèrent des caries de la couronne sur le plan pathogénique, mais aussi sur le plan morphologique. Par conséquent, les concepts classiques du traitement de restauration effectué dans le cadre de caries de la couronne sont moins efficaces, voire totalement irréalisables en cas de caries radiculaires.

Les lésions carieuses radiculaires peuvent être situées dans des zones difficilement accessibles telles que les espaces interproximaux, et leur restauration peut donc nécessiter le sacrifice d’une grande quantité de tissus dentaires sains. Ces problèmes sont à l’origine de la survie souvent plus courte des restaurations des lésions carieuses radiculaires par rapport aux restaurations coronaires.

Très souvent, le traitement de patients âgés, qui représentent le principal groupe à risque, pose aussi des difficultés. De nombreux patients de ce groupe ne sont pas pleinement en mesure de subir un traitement. Les limitations de mobilité, surtout chez les patients dépendants, peuvent nécessiter des soins en dehors du cabinet dentaire.
L’utilisation des dispositifs et matériaux dont dispose le cabinet dentaire est par conséquent fortement limitée pour le traitement de ces patients.

 

Matériaux de restauration des caries radiculaires

Différentes catégories de matériaux sont disponibles pour restaurer les lésions radiculaires :
1. Les résines composites,
2. Les verres ionomères classiques et leur dernière génération, les verres hybrides,
3. Les matériaux combinant les propriétés des deux classes de matériaux précédentes, tels que les verres ionomères modifiés par adjonction de résine.

 

Les résines composites microhybrides et nanohybrides sont dotées d’excellentes propriétés physiques, notamment d’une grande résistance à l’abrasion et à l’érosion, d’une résistance élevée à la flexion, d’une bonne aptitude au polissage, et de qualités esthétiques. De plus, ces matériaux peuvent être mis en place par une technique adhésive qui permet des traitements dentaires minimalement invasifs.

La mise en place des résines composites nécessite notamment un contrôle très strict de l’humidité – dont l’obtention est généralement difficile en cas de caries radiculaires – et exige un processus en plusieurs étapes comme un mordançage à l’acide et l’application de produits adhésifs. Ces dernières années, les fabricants se sont efforcés de simplifier ce processus, notamment en combinant les étapes de mordançage et d’application de l’adhésif, mais la mise en œuvre – en particulier dans les zones juxtagingivales ou sous-gingivales – reste toutefois techniquement complexe.

 

Alors que seules les dernières générations de Ciments Verres Ionomères (CVI) sont de plus en plus utilisées pour restaurer les cavités soumises aux contraintes, cette classe de matériaux a toujours été une solution valable pour les lésions cervicales (car les problèmes liés à l’abrasion et aux contraintes sont moins importants qu’au niveau des surfaces occlusales et proximales). Les verres ionomères modifiés par adjonction de résine ont tout particulièrement montré un taux de survie élevé dans les lésions cervicales (il convient toutefois de noter que de nombreuses études les évaluaient dans des lésions non carieuses).

 

La dernière génération de matériaux, dénommée verres hybrides, se caractérise par une grande stabilité à l’abrasion et à l’érosion, et par une meilleure résistance à la flexion. Ces propriétés sont dues à des modifications de la composition chimique du matériau, principalement à l’ajout d’une phase vitreuse constituée de particules plus petites et de chaînes d’acide acrylique plus longues. Une étape supplémentaire de revêtement avec une nanorésine donne à la surface un aspect plus lisse et esthétique.

 

mise en place d’EQUIA Forte HTFig. 04 : mise en place d’EQUIA Forte HT.

EQUIA Forte Coat crée une surface lisseFig. 05 : EQUIA Forte Coat crée une surface lisse.

restauration après la finition (avec l’aimable autorisation de J. Tapia Guadix, Espagne)Fig. 06 : restauration après la finition (avec l’aimable autorisation de J. Tapia Guadix, Espagne).

 

Plusieurs études menées en laboratoire ont confirmé que les verres hybrides présentent en effet des propriétés nettement supérieures à celles de leurs prédécesseurs, tout en continuant à offrir les mêmes avantages, c’est-à-dire la facilité de la mise en place et la bioactivité, en particulier la libération de fluorure – un aspect pertinent pour la protection contre les caries radiculaires secondaires.

D’autres études ont démontré que les CVI réduisent le risque carieux au niveau des limites marginales de la restauration sur une distance allant jusqu’à 300 μm. Une zone intermédiaire résistante aux acides, constituée de calcium dissous provenant des tissus dentaires et du fluor libéré par le matériau, est en outre susceptible d’augmenter la résistance contre les lésions secondaires(8).

 

 

Données cliniques

Il existe très peu de données sur les matériaux de restauration des lésions radiculaires. Les données comparatives sont particulièrement rares. La plupart des études indiquent qu’à l’exception de la forme anatomique et de la concordance des teintes (où les verres ionomères peuvent poser plus de difficultés), et des lésions secondaires (où les composites peuvent accroître le risque), le risque d’échec est similaire entre les verres ionomères et les composites.
En général, le risque d’échec de la restauration est relativement élevé pour cette indication. Il s’est également avéré que le risque carieux peut modifier la probabilité d’échec, les composites présentant des échecs plus fréquents, principalement dans les caries secondaires, chez les personnes à haut risque(6, 8, 9).

 

En ce qui concerne les verres hybrides, les seules données disponibles sont des études randomisées qui ont comparé ce matériau avec les résines composites dans les lésions non carieuses.

 

lésion cervicale non carieuse, avant traitementFig. 7 : lésion cervicale non carieuse, avant traitement.

restauration initiale par un verre hybrideFig. 8 : restauration initiale par un verre hybride.

même restauration après 6,5 ansFig. 9 : même restauration après 6,5 ans (avec l’aimable autorisation du Prof. M. Basso, Italie).

 

L’étude la plus intéressante concernant les caries radiculaires est celle qui a évalué un verre hybride (EQUIA Forte, GC) par rapport à des restaurations en résine composite (Filtek Supreme XTE, 3M) pour le traitement de lésions radiculaires non carieuses présentant une dentine sclérotique chez 88 patients d’âge moyen et plus avancé (50 à 70 ans)(10). Une évaluation de la survie, de la qualité et des coûts de 92 restaurations, mises en place sans aucune préparation mécanique (ayant finalement entraîné des taux d’échec annuels élevés pour les deux groupes) a été réalisée sur une durée de 36 mois.

 

La qualité des restaurations a été évaluée après 1, 18 et 36 mois selon les critères de la Fédération Dentaire Internationale (FDI). Les coûts ont été évalués à l’aide d’une approche reposant sur le microcosting (comptabilisation du temps utilisé pour la mise en place du matériau) et, pendant le suivi, sur les prestations de l’assurance maladie obligatoire en Allemagne. Après 36 mois, une perte totale de rétention a été constatée pour 17 verres hybrides et 19 résines composites, et une perte partielle pour 5 verres hybrides.

 

Les coûts liés aux verres hybrides étaient nettement inférieurs, tant au début de l’étude (verres hybrides : 32,57€ [écart type 16,36€] par rapport aux résines composites : 44,25€ [écart type 21,40€]) et sur toute la période de suivi (verres hybrides : 41,72€ [écart type 25,08€] par rapport aux résines composites : 51,60€ [écart type 26,17€]).

 

Conclusion

Compte tenu de leurs meilleures propriétés biomécaniques, de leur rapport coût-efficacité et de leur
caractère plus tolérant vis-à-vis des complications généralement induites par les lésions radiculaires, les verres
hybrides peuvent offrir une excellente solution de restauration. Néanmoins, il est nécessaire d’obtenir davantage de données cliniques sur le traitement des lésions carieuses radiculaires.
À l’avenir, plus d’attention devrait être accordée aux mesures de prévention, aux traitements non invasifs et aux matériaux bioactifs, notamment l’utilisation d’argent
, dont le fluorure de diamine d’argent pour modifier les lésions. Jusqu’à présent, ces aspects ne disposent toutefois d’aucune donnée clinique.

 


 

Références bibliographiques :

(1) N. Takahashi, B. NyvadThe Role of Bacteria in the Caries Process: Ecological Perspectives
Journal of Dental Research 90(3) (2011) 294-303.

(2) F. Schwendicke, C. Splieth, L. Breschi, A. Banerjee, M. Fontana, S. Paris, M.F. Burrow, F. Crombie, L.F. Page, P. Gaton-Hernandez, R. Giacaman, N. Gugnani, R. Hickel, R.A. Jordan, S. Leal, E. Lo, H. Tassery, W.M. Thomson, D.J. Manton When to intervene in the caries process ? An expert Delphi consensus statement
Clin Oral Investig (2019).

(3) A.R. Jordan, J. Krois, U. Schiffner, W. Micheelis, F. SchwendickeTrends in caries experience in the permanent dentition in Germany 1997-2030 : Morbidity shifts in an ageing society
Scientific Reports 9(1) (2019) 5534.

(4) F. Schwendicke, J. Krois, U. Schiffner, W. Micheelis, R.A. JordanRoot caries experience in Germany 1997 to 2014 : Analysis of trends and identification of risk factors
J Dent 78 (2018) 100-105.

(5) R. Lopez, P.C. Smith, G. Gostemeyer, F. Schwendicke – Ageing – dental caries and periodontal diseases
J Clin Periodontol 44 Suppl 18 (2017) S145-s152.

(6) H. Meyer-Lueckel, V. Machiulskiene, R.A. GiacamanHow to Intervene in the Root Caries Process ? Systematic Review and Meta-Analyses, Caries Res 53(6) (2019) 599-608.

(7) S. Paris, A. Banerjee, P. Bottenberg, L. Breschi, G. Campus, S. Doméjean, K. Ekstrand, R.A. Giacaman, R. Haak, M. Hannig, R. Hickel, H. Juric, A. Lussi, V. Machiulskiene, D. Manton, A. Jablonski- Momeni, R. Santamaria, F. Schwendicke, C.H. Splieth, H. Tassery, A. Zandona, D. Zero, S. Zimmer, N. OpdamHow to Intervene in the Caries Process in Older Adults: A Joint ORCA and EFCD Expert Delphi Consensus Statement
Caries Res 54(5-6) (2020) 1-7.

(8) W. Tonprasong, M. Inokoshi, M. Shimizubata, M. Yamamoto, K. Hatano, S. MinakuchiImpact of direct restorative dental materials on surface root caries treatment. Evidence based and current materials development : A systematic review
Japanese Dental Science Review 58 (2022) 13-30.

(9) L. Pilcher, S. Pahlke, O. Urquhart, K.K. O’Brien, V. Dhar, M. Fontana, C. González-Cabezas, M.A. Keels, A.K. Mascarenhas, M.M. Nascimento, J.A. Platt, G.J. Sabino, R.L. Slayton, N. Tinanoff, D.A. Young, D.T. Zero, M.P. Tampi, D. Purnell, J. Salazar, S. Megremis, D. Bienek, A. Carrasco-LabraDirect materials for restoring caries lesions : Systematic review and meta-analysis-a report of the American Dental Association Council on Scientific Affairs
J Am Dent Assoc 154(2) (2023) e1-e98.

(10) F. Schwendicke, A. Müller, T. Seifert, L.M. Jeggle-Engbert, S. Paris, G. GöstemeyerGlass hybrid versus composite for non-carious cervical lesions : Survival, restoration quality and costs in randomized controlled trial after 3 years
J Dent 110 (2021) 103689.

 


 

Cet article vous est proposé par

L’examen bucco-dentaire pour les femmes enceintes

le 04-09-2023

En juillet dernier, l’Assurance Maladie, l’Unocam (Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire) ainsi que les syndicats de la profession ont conclu un accord et signé la nouvelle convention dentaire 2023-2028. Cette convention marque une étape majeure dans le domaine de la prévention en France et une réorientation profonde de l’exercice en faveur de la santé bucco-dentaire des patients. EBD

 

Un objectif ambitieux pour des « générations sans carie »

Cette nouvelle convention est claire : faire émerger une génération d’enfants et de jeunes sans carie. Pour atteindre cet objectif, la convention prévoit l’annualisation de l’Examen Bucco-Dentaire (EBD) pour les patients de 3 à 24 ans, contre un examen tous les trois ans actuellement. De plus, elle valorise davantage le temps passé par les chirurgiens-dentistes à faire de la prévention et des soins précoces dans le but de mieux préserver les dents de nos patients.

Les examens bucco-dentaires seront revalorisés de 10 € : passant de 30 à 40 € pour un examen simple, de 42 à 52 € pour un EBD avec 1-2 radiographies et de 54 à 64 € pour un EBD avec 3-4 radiographies ou radiographie panoramique.

 

Un virage pris depuis 2023

La création d’un dispositif de prévention bucco-dentaire pour les femmes enceintes mis en place par l’avenant n°1 de la convention nationale des chirurgiens-dentistes du 25 août 2018 a été une belle première étape.

 

img-01-article-marie-dacquin-EBD-femmes-enceintesFig. 01 : position semi-assise d’examen de la femme enceinte.

 

Au cours de leur grossesse, les femmes sont particulièrement réceptives aux messages de prévention portant sur leur santé et celle de leur futur enfant. Ce nouveau dispositif vise ainsi à les sensibiliser durant cette période sur la santé bucco-dentaire (hygiène orale, hygiène alimentaire, prévention de la carie de la petite enfance) et le recours au chirurgien-dentiste.
La femme enceinte peut bénéficier de cet examen de prévention bucco-dentaire à compter du 4è mois de grossesse jusqu’au 12è jour après l’accouchement et sera bientôt prolongé jusqu’à 6 mois après l’accouchement. Il comprend : une anamnèse, un EBD ainsi qu’une action de prévention et d’éducation sanitaire pour la femme et le futur enfant. Il peut être complété si nécessaire par des radiographies intrabuccales et l’établissement d’un programme de soins au même tarif que les autres EBD.

Pour cela la patiente doit remettre le formulaire « Examen de prévention bucco-dentaire (maternité) » qui lui a été adressé par sa caisse d’Assurance Maladie.

 

Des messages forts

En France, il y a eu 723 000 naissances en 2023. La grossesse est un état physiologique où des modifications hormonales et immunitaires rapides et importantes sont observées sur une courte durée. Ces nombreux changements ont pour but le développement et la croissance du fœtus, l’adaptation de la mère à l’état gravidique et la préparation à l’accouchement.
Mais ces changements physiologiques peuvent parfois atteindre un état pathologique plus ou moins avancé, notamment au niveau de la cavité buccale. La gingivite gravidique et les épulis gravidiques (tumeurs bénignes), liés aux changements hormonaux, en sont des manifestations fréquentes.

 

graphique-article-EBD-Marie-DacquinFig. 02 : concentration plasmatique d’œstrogène, progestérone et gonadotrophine chorionique (HCG) au cours de la grossesse (Idelman, et al., 2001).

 

De plus, certains comportements liés à la grossesse vont avoir un impact sur la santé bucco-dentaire. C’est le cas du changement d’alimentation qui, associé à des modifications salivaires typiques de cette période (diminution du pH et du pouvoir tampon), augmentent le risque carieux ; ou encore des vomissements ou reflux gastro-œsophagiens qui multiplient les attaques acides sur les dents et peuvent engendrer des érosions.

On entend encore trop souvent la phrase « un bébé, une dent » qui signifie que chaque grossesse entraîne la perte d’une dent chez la mère. Même si cette croyance ancrée dans les mœurs n’est pas fondée, les modifications hormonales de la femme enceinte sont les principales causes des lésions buccales liées à la grossesse.

 

Attention aux conduites à risques

Notre rôle ne s’arrête pas là ! Cet examen est aussi l’occasion d’aborder la question de la consommation de substances toxiques. Le tabac pendant la grossesse multiplie par deux le risque de fausse couche, le risque de grossesse extra-utérine, mais aussi le risque d’accouchement prématuré.
À nous d’accompagner nos patientes avec nos conseils, de l’empathie et des objectifs réalisables. Il ne s’agit pas d’être moralisateur.

Sans oublier d’évoquer la substance toxique la plus tératogène en contexte de grossesse dont les effets sur le fœtus sont les plus importants pendant les deux premiers mois de vie intra-utérine : l’alcool !
Découvrez la fiche conseil de l’UFSBD.

 

img-02-article-marie-dacquin-EBD-femmes-enceintesFig. 03 : fumer et boire pendant la grossesse (même en faible quantité) nuit à la santé de votre enfant.

 

Sans oublier le futur enfant

Il est important d’évoquer le risque de contamination croisée verticale mère-enfant à travers la nourriture goûtée sur la même cuillère par exemple ; ou horizontale concernant les enfants en crèche par les échanges de jouets, tétines ou autres… Cela peut être à l’origine de caries précoces de l’enfant au même titre qu’un allaitement à la demande ou encore la prise de biberon nocturne tardive non accompagnée.

Nous pouvons conseiller l’utilisation de la tétine qui peut prévenir de la mort subite du nourrisson par le maintien d’un bon positionnement sur le dos lors du sommeil et une très bonne réponse lors d’un stress physique ou environnemental, tout en évoquant un arrêt recommandé à 3 ans. L’EBD dès 3 ans sera un autre rendez-vous clé pour nous.
Il est nécessaire d’évoquer le brossage dès les premières dents apparues avec, pour commencer, les brosses doigtiers en silicone où l’on déposera une trace de dentifrice adaptée au moment du coucher.

 

fig-04-fluor-marie-dacquin

fig-05-fluor-marie-dacquinFig. 04 : recommandations de l’UFSBD en matière de fluor dans les dentifrices.

 

Le recours à l’examen bucco-dentaire mis en place par l’Assurance Maladie reste faible bien que les besoins soient importants : la prévalence de parodontite est de 34,2 % et celle de la carie de 29,9 %. Alors que celui-ci cible justement la santé parodontale de la patiente et permet l’élaboration d’un programme de soins à réaliser ainsi que des conseils à communiquer pour elle et son futur enfant.
L’intérêt d’un dépistage bucco-dentaire systématique et de conseils adaptés au sein des maternités semblerait justifié au vue des nombreuses interrogations des futures mères concernant leur santé bucco-dentaire et celle de leur enfant.

 

Références bibliographiques

Vergnes J-N., Pastor-Harper D., Constantin D., Bedos C., Kaminski M., Nabet C., et al. – Santé bucco-dentaire perçue et recours aux soins pendant la grossesse : étude MaterniDent.
Santé Publique. 2013;25(3):281.

Delbos, Bandon, Rouas, d’Arbonneau – Santé orale de la femme enceinte et de la petite enfance.
EMC – Médecine buccale. 2014;1‐12.

Letort M. – Besoins d’informations de la femme enceinte sur la santé bucco-dentaire de son futur enfant : état des lieux sur 314 femmes enceintes de la région Aquitaine et test d’une plaquette d’information.
[Thèse d’exercice pour le diplôme d’état de docteur en chirurgie dentaire]. Bordeaux; 2013.

Comité éditorial pédagogique de l’UVMaF.Modifications physiologiques de la grossesse.
Université Numérique Francophone des Sciences de la Santé et du Sport. 2011 [Cité 20 janvier 2020].

Recommandations professionnellesComment mieux informer les femmes enceintes ?
HAS, Service de recommandations professionnelles; 2005.

Einarson TR., Piwko C., Koren G. – Prevalence of nausea and vomiting of pregnancy in the USA: a meta analysis.
J Popul Ther Clin Pharmacol. 2013;20(2):e163-170.

London V., Grube S., Sherer DM., Abulafia O. – Hyperemesis Gravidarum: A Review of Recent Literature.
Pharmacology. 2017;100(3‐4):161‐71.

Davy C. – Hyposialie et xérostomie : le point sur les étiologies, les conséquences bucco-dentaires et la prise en charge. Rôle du pharmacien d’officine.
[Thèse d’exercice pour le diplôme d’état de docteur en pharmacie]. [UFR Sciences Pharmaceutiques et Biologiques]: Nantes; 2016.

Recommandations en Santé PubliqueStratégies de prévention de la carie dentaire.
HAS, Service évaluation économique et santé publique; 2010.

 

Vous avez manqué les deux articles précédents sur le sujet ? Retrouvez-les dès maintenant en libre accès sur Dentalespace :
Bilan bucco-dentaire chez les jeunes enfants : quels objectifs ?
L’examen bucco-dentaire M’T Dents de 6 à 15 ans

 


 

Encart-Formation-Marie-DacquinMarie Dacquin vous propose une classe virtuelle sur le thème « Changez de vision sur l’EBD, approche préventive et thérapeutique » le 26 janvier 2024 de 9h à 17h. Pour vous inscrire, c’est ici !

REPLAY – Maintenance : gros mot ou maître mot ?

le 19-04-2021

Replay du Facebook Live « Maintenance : gros mot ou maître mot ? »
avec les Drs Jérémie Perrin et Alexandre Philippakis.

Date de diffusion : mardi 6 avril 2021, à 20h30.

 

 

Nous remercions les nombreux participants d’avoir assisté à cette conférence en direct.

 

S’il est bien une préoccupation commune que nous partageons tous, nous, chirurgiens-dentistes, quelle que soit notre spécialité, c’est le maintien de nos résultats thérapeutiques.

Et en la matière il n’est plus à démontrer aujourd’hui, qu’aucun traitement bucco-dentaire ne saurait être pérenne en l’absence d’un suivi et d’une maintenance appropriés, que ce soit par le patient ou par le praticien. Si l’on prend l’exemple des prothèses dentaires, elles remplacent des dents qui ont été le plus souvent extraites en raison de négligence de la part des patients. Réhabiliter ces patients  avec des prothèses sans corriger et améliorer l’hygiène bucco-dentaire ne pourra que conduire à des échecs et des récidives.

 


 

 

Vos questions, leurs réponses

Les brosses à dents électriques créent-elles des récessions ?
Non, elles sont même indiquées en post-opératoire après des greffes muco gingivales :
« Si bad électrique Oscillo-Rotative (OR), recouvrement radiculaire significativement plus important en post chirurgie mucogingivale que si bad manuelle. Les deux bad ont réduit de manière significative les indices de plaque et de saignement par rapport à la valeur initiale Les bad électriques OR ont montré des indices de plaque et de saignement significativement plus bas comparés aux manuelles. »
Acunzo R, Limiroli E, Pagni G, Dudaite A, Consonni D, Rasperini G. Gingival Margin Stability After Mucogingival Plastic Surgery. The Effect of Manual Versus Powered Toothbrushing: A Randomized Clinical Trial. J Periodontol.
2016 ;87(10):1186-94.

Les brosses électriques Oscillo-Rotative (OR) chez des patients avec des récessions ont tendance à faire diminuer les récessions par rapport à des brosses manuelles.

 

Doit-on démonter tous les ans les prothèses implantaires ?
Il n’y a pas besoin de démonter tous les ans les prothèses implantaires, sauf s’il y a un problème bien entendu. (Position Statement, American college of prosthodontits. 2016 et Alani A. , Bishop K . Peri-implantitis. Part 2: Prevention and maintenance of peri-implant health.British Dental Journal 2014; 217: 289-297).

 

Quel est l’importance du design implantaire des prothèses pour éviter des péri-implantites et pertes osseuses marginales ?
Jérémie et Alexandre cite dans cette conférence 2 sources qui sont :
Serino G, Ström C. Peri-implantitis in partially edentulous patients: association with inadequate plaque control. Clin Oral Implants Res. 2009 ;20(2):169-74.
Tormena M, Matarazzo F, de Oliveira BM, Pereira O, Previdelli I, Araújo MG. The effect of inadequate access to peri-implant hygiene on marginal bone level. A 4-year cohort prospective study. Clin Oral Impl Res. 2020;31:836–845.

Pour approfondir la question du design implantaire nous vous invitons à consulter ces documentations :
Katafuchi M, Weinstein BF, Leroux BG, Chen YW, Daubert DM. Restoration contour is a risk indicator for peri-implantitis: A cross-sectional radiographic analysis. J Clin Periodontol. 2018 ;45(2):225-232.
De Tapia B, Mozas C, Valles C, Nart J, Sanz M, Herrera D. Adjunctive effect of modifying the implant-supported prosthesis in the treatment of peri-implant mucositis. J Clin Periodontol. 2019;46(10):1050-60.

 


Ce Facebook LIVE vous est proposé par Oral-B.

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Les clés du conseil patient

le 06-12-2019

REPLAY émission LIVE – Les clés du conseil patient

Dans le cadre de sa démarche de promotion de l’Hygiène bucco-dentaire, le Laboratoire Johnson & Johnson Santé Beauté France vous a invité à assister à un conférence web en direct le vendredi 6 décembre 2019 à 20h30.

 

 

Nous remercions les nombreux participants d’avoir assisté à cette conférence en direct et vous proposons dans cet article de la (re)découvrir.

 

Revivez ce webinaire consacré à la communication entre les chirurgiens-dentistes et leurs patients : à chaque profil de duo « chirurgien-dentiste et patient » son style de communication.
Comment convaincre le patient  Comment changer son comportement ? Comment adapter la communication à chaque profil de patient ? Quels supports d’éducation utiliser ?… Tant de questions auxquelles nos deux experts les docteurs Patrick Ginies et Charles Micheau vont tenter de répondre !

 

Notre couple de praticiens va plus loin et vous propose leurs conseils pratiques ainsi que les astuces de langage à connaître pour convaincre vos patients d’intégrer l’Hygiène bucco-dentaire dans leurs habitudes quotidiennes.

 

Les trois conférenciers :
• Dr Patrick Ginies
Département Douleur, Psychosomatique, Maladie fonctionnelle au CHU Montpellier.

• Dr Charles Micheau
Chirurgien-dentiste avec une activité exclusive en parodontologie et implantologie ainsi qu’une activité hospitalo-universitaire. Egalement membre de l’Association Dentaire Française (ADF).

• Valérie Durier
Journaliste et animatrice.

 


 

Cette vidéo vous est proposée par le Laboratoire Johnson & Johnson Santé Beauté France.

Brossage des dents : l’adapter pour l’adopter

le 23-10-2019

INTRODUCTION

Le contrôle de plaque en France se résume très souvent dans la formule : brosse à dents souple et technique du rouleau pour tous les adultes. Et pour cause, c’est la recommandation officielle 1. Pourtant, dans d’autres pays, la technique de Bass sera mise en avant ; dans d’autres encore ce sera la technique de Bass modifiée #1, ou la technique de Stillman 2,3. Cet engouement pour la technique du rouleau résulte-t-il d’une véritable meilleure efficacité ou d’une habitude que l’on aurait du mal à voir changer ? Est-il possible qu’une seule technique de brossage l’emporte sur toutes les autres ? Et se pourrait-il que tout le monde soit à l’aise avec ?
Nous vous proposons, dans cet article, sur des bases scientifiques, mais aussi grâce à l’expérience des membres de l’équipe ParoSphère Formation, de commencer par démonter nos certitudes et par revoir les bases du brossage des dents.
Nous nous concentrerons donc sur le contrôle de plaque avec la brosse à dents et la méthode de brossage.
Il conviendra bien entendu de compléter ces informations par des lectures portant sur le nettoyage interdentaire, sur l’usage des antiseptiques et sur les moyens d’apprentissage et de motivation.

EFFICACITÉ, TRAUMATICITÉ ET ACCEPTABILITÉ 

Trois critères devraient encadrer le brossage. Ils ont été proposés dès le début des années 70 4. Le brossage doit à la fois être efficace contre la plaque dentaire (critères d’efficacité), le moins traumatique possible sur les tissus dentaires et parodontaux (critères de traumaticité), et réalisable par le patient (critère d’acceptabilité).

Par exemple, une brosse à dents dure est plus efficace qu’une brosse souple pour éliminer la plaque dentaire 5, mais elle est trop traumatique. Il est donc nécessaire de privilégier une brosse souple. De surcroît, celle-ci rendrait le brossage plus confortable pour le patient, on gagnerait donc en acceptabilité. Néanmoins elle est moins efficace que la brosse dure. C’est pourquoi on doit lui adjoindre une technique de brossage permettant de la rendre plus performante. Cette technique ne doit pas être traumatique, et doit être relativement simple à apprendre.

CHOISIR ENTRE BROSSE A DENTS ELECTRIQUE ET MANUELLE

 

EFFICACITÉ

Sans aucun doute, les brosses électriques sont plus efficaces que les brosses à dents manuelles. Il faut avouer qu’avec 600 à 2000 passages par dent et par brossage avec une brosse électrique contre un bon maximum de 10 passages par dent en brossage manuel, on n’est guère surpris du résultat. Mais en y regardant de plus près, cette différence se révèle bien faible. Ainsi, la méta-analyse qui fait référence 6 indique que la brosse électrique est effectivement significativement plus performante sur l’indice de plaque et sur l’indice gingival que la brosse manuelle. Mais elle met aussi en évidence que le delta entre les deux moyens, en ne dépassant pas l’incrément des indices retenus, n’est pas visible lors d’un examen clinique. Et, surtout, il apparaît que les performances de brossage diffèrent considérablement d’une étude à l’autre, montrant ainsi clairement que les instructions données quant à l’utilisation d’un moyen de brossage comptent bien plus que l’arrivée de l’électricité dans nos brosses à dents.

 

TRAUMATICITÉ

Concernant la traumaticité, quelques études semblent montrer que les brosses à dents électriques, contre toute attente, ne sont pas plus traumatiques que les brosses manuelles 7. Cependant, les protocoles d’étude proposés n’y permettent pas de rendre le brossage manuel peu traumatique et les groupes ne sont pas standardisés pour intégrer des facteurs confondants tels que le biotype gingival.

 

ACCEPTABILITÉ

L’acceptabilité varie selon les patients. Certains préfèrent la brosse électrique, d’autres pas. Adaptons-nous à leurs goûts. Notons tout de même qu’il a été proposé que la brosse électrique soit recommandée pour les personnes qui ont des difficultés motrices ou psychomotrices à appliquer une méthode de brossage manuelle et pour les personnes non inspirées par leur hygiène orale 8, bien que cette motivation dépende en grande partie de notre capacité à entraîner le patient vers une meilleure hygiène orale.

LES TECHNIQUES DE BROSSAGE MANUEL

Il n’existe pas moins de 17 techniques de brossage.

Les techniques dites « naturelles » sont les techniques horizontale, verticale et elliptique, qui se pratiquent les dents en occlusion avec de larges mouvements. On peut y ajouter la technique mixte, qui est une combinaison de deux à trois des techniques citées. Cette technique mixte est la plus couramment utilisée spontanément.

Des techniques plus méthodiques ont été proposées. La plus connue en France est la technique du rouleau. On peut y ajouter les techniques de Fones (circulaire), de Bass, de Stillman, de Charters, de Leo, de Smith et Bell, de Hirschfeld, de Bruske et la technique Solo de Sedelmayer.

Enfin, des variations de ces techniques ont été proposées. Il s’agit des techniques de Bass modifiée (2 versions) et de Stillman modifiée.

Les principales de ces techniques sont décrites dans la Figure 1.

Principales techniques de brossage.

Figure 1 : Principales techniques de brossage.

LA TECHNIQUE DE BROSSAGE MANUEL LA PLUS ADAPTÉE 

 

EFFICACITÉ

Le nombre d’études proposant de comparer l’efficacité des techniques de brossage ne sont pas nombreuses 2. De surcroît, ces études ne peuvent pas proposer de protocoles en double aveugle contre placebo. Enfin, parce qu’un patient peut être plus à l’aise avec des mouvements rotatoires, plutôt qu’avec des mouvements de balayage et que peut-être qu’en lui forçant une technique, on ne parviendra pas à un bon résultat, on ne peut raisonnablement affirmer qu’une méthode de brossage est universellement supérieure à une autre.

Le fait que selon les pays, les recommandations en rapport avec la technique de brossage varie considérablement nous conforte dans cette analyse 2,3.

 

TRAUMATICITÉ

En terme de traumaticité, là encore aucune étude ne permet d’affirmer qu’une méthode est meilleure qu’une autre. Il faudrait pour cela observer des techniques de brossage parfaitement calibrées avec des brosses à dents identiques, sur une durée suffisante, sur des biotypes gingivaux équivalents, avec les mêmes malpositions chez tous les sujets, avec la même force appliquée sur la brosse, avec la même amplitude de mouvement, etc. Mission impossible. Actuellement, on s’accorde donc à affirmer que les techniques travaillant sur le minimum de dents à la fois et avec de faibles amplitudes de mouvement sont sans doute les moins traumatiques.

 

ACCEPTABILITÉ

Enfin, pour être acceptable, une technique de brossage se doit d’être assez simple à mémoriser et à réaliser.

CHOISIR UNE TECHNIQUE POUR SON PATIENT 

Imposer la technique du rouleau à tous nos patients, c’est comme forcer un guitariste classique de niveau modeste à jouer parfaitement de la guitare jazz. Peut-être y sera-t-il effectivement plus doué, mais peut-être eut-il fallu seulement l’aider à progresser dans la technique de sa discipline.

De surcroît, nous observons souvent que les patients reviennent très vite à leur technique de brossage initiale, malheureusement plus traumatique, sans doute parce que le mouvement leur paraît plus naturel.

En conséquence, pourquoi ne pas adapter la technique dite « naturelle » de nos patients vers une technique aussi efficace mais moins traumatique ?

Pour cela, il n’est pas nécessaire de connaître les 17 techniques de brossage manuel citées précédemment. Dans notre pratique, il apparaît que 3 d’entre elles suffisent amplement. Il s’agit de la technique du rouleau, de la technique de Bass et de la technique de Bass modifié #2, parce qu’elles sont efficaces, parce que bien utilisées elles semblent peu traumatiques, parce qu’elles sont bien acceptées par les patients et, enfin, parce qu’elles se rapprochent des techniques dites naturelles (Vidéos 1, 2 et 3). À celles-ci, il convient bien entendu d’ajouter le moyen alternatif qu’est le brossage électrique.

Il n’est prouvé nulle part qu’il est plus judicieux de changer complètement la technique d’un patient plutôt que de l’adapter. En conséquence, notre groupe de travail ParoSphère Formation en est arrivé à proposer, en se basant sur la pratique clinique de ses membres, qu’il est préférable d’adapter la technique du patient dans la majorité des cas. Par exemple, un patient qui privilégierai la technique horizontale, pourrait réduire l’amplitude de ses mouvements, orienter la brosse vers le sulcus et se rapprocher ainsi de la technique de Bass. De la même façon, une technique verticale irait vers la technique du rouleau. Et ainsi, une technique elliptique pourrait devenir aisément une technique de Bass modifiée (Figure 2). Et si le patient paraît vraiment ancré dans une technique naturelle mixte, il est aussi envisageable d’adapter de la même façon les techniques contrôlées en bouche : technique du rouleau en antérieur, technique de Bass du côté qui tient la brosse et technique de Bass modifiée #2 du côté opposé (Figure 3). Cela peut paraître complexe, mais si l’on se rapproche de mouvement qui paraissent naturels au patient, alors, pour lui, ce sera plus simple.

Adapter les techniques « naturelles » verticale, horizontale et elliptique.

Figure 2 : Adapter les techniques « naturelles » verticale, horizontale et elliptique.

Adapter une technique « naturelle » mixte.

Figure 3 : Adapter une technique « naturelle » mixte.

En revanche, chez les patients qui ont trouvé dans leur brossage un moyen de se défouler ou qui ont un besoin de propreté tournant à l’obsession, à l’image de cette patiente qui nous confiait « plus je me lave, plus je suis sale, et pas seulement pour les dents (!)», favorisant ainsi le risque d’abrasion gingivale, de récession gingivale et d’abrasion des tissus dentaires, nous suggérons de changer totalement les habitudes en modifiant complètement la technique de brossage, voire de proposer au moins temporairement une brosse à dents électrique incorporant un capteur de pression, afin de rééduquer la force exercée par le patient sur ses dents.

ADAPTER LA BROSSE A DENTS A LA TECHNIQUE

Une fois la technique choisie, et seulement après cela, il parait judicieux de proposer un modèle de brosse à dents adapté. Ainsi, la technique du rouleau pourra orienter le choix vers une brosse à dents souple conventionnelle (15/100 à 20/100), tandis que des techniques sulculaires, en raison du risque de léser l’attache épithéliale, devraient nous orienter vers des brosses plus douces encore (8/100 à 10/100). Dans tous les cas, une petite tête de brosse semble plus indiquée pour atteindre les surfaces distales des dernières dents et faire le tour des dents en malposition.

CONCLUSION 

Proposer à toutes les patientes et à tous les patients de se convertir à la seule technique du rouleau, comme recommandé en France, est sans doute une erreur. Dans la mesure où plusieurs techniques ont fait la preuve de leur efficacité sans pour autant paraître traumatiques, seul le critère de l’acceptabilité devrait guider notre choix. Il paraît ainsi plus judicieux d’adapter la technique aux patients. Pour se faire, en attendant qu’une profession semblable à celle des hygiénistes apparaisse en France, il est urgent que nous, chirurgiens-dentistes français, prenions le temps d’apprendre ces techniques pour nous-mêmes et d’apprendre à les enseigner à nos patients, et ce avec bienveillance et patience.


BIBLIOGRAPHIE

1. UFSBD. Recommandations Hygiène Bucco-Dentaire – UFSBD. Available at: http://www.ufsbd.fr/espace-grand-public/votre-sante-bucco-dentaire/recommandations-hygiene-bucco-dentaire/. (Accessed: 10th July 2018)
2. Muller-Bolla, M., Courson, F., Manière-Ezvan, A. & Viargues, P. Le brossage dentaire : quelle méthode ? Rev Odont Stomat 40, 239–260 (2011).
3. Wainwright, J. & Sheiham, A. An analysis of methods of toothbrushing recommended by dental associations, toothpaste and toothbrush companies and in dental texts. Br. Dent. J. 217, E5 (2014).
4. Hansen, F. & Gjermo, P. The plaque-removing effect of four toothbrushing methods. Scand. J. Dent. Res. 79, 502–6 (1971).
5. Zimmer, S., Öztürk, M., Barthel, C. R., Bizhang, M. & Jordan, R. A. Cleaning efficacy and soft tissue trauma after use of manual toothbrushes with different bristle stiffness. J. Periodontol. 82, 267–71 (2011).
6. Yaacob, M. et al. Powered versus manual toothbrushing for oral health. Cochrane database Syst. Rev. CD002281 (2014). doi:10.1002/14651858.CD002281.pub3
7. Dörfer, C. E., Staehle, H. J. & Wolff, D. Three-year randomized study of manual and power toothbrush effects on pre-existing gingival recession. J. Clin. Periodontol. 43, 512–519 (2016).
8. Claydon, N. C. Current concepts in toothbrushing and interdental cleaning. Periodontol. 2000 48, 10–22 (2008).


 Cet article vous est proposé par Frédéric Duffau et Matthieu Dalibard.

parosphère formation

Qui sont vos patients et quel chirurgien-dentiste êtes-vous ?

le 16-10-2019

REPLAY émission Live – Qui sont vos patients et quel chirurgien-dentiste êtes-vous ?

Dans le cadre de sa démarche de promotion de l’Hygiène bucco-dentaire, le Laboratoire Johnson & Johnson Santé Beauté France vous a invité à assister à un conférence web en direct le mercredi 16 octobre à 20h30.

 

 

Nous remercions les nombreux participants d’avoir assisté à cette conférence en direct et vous proposons dans cet article de la (re)découvrir.

 

Que ce soit pour les patients comme pour les praticiens, il existe différents profils de personnalité bien distincts. Il est donc important de bien se connaître et de bien connaître ses patients pour communiquer au mieux avec eux, et pour faciliter ainsi, leur adhésion aux conseils d’Hygiène bucco-dentaire.

Revivez cette web-émission consacrée à la communication entre les chirurgiens-dentistes et leurs patients. Gérer des personnalités complexes, adapter votre conseil… Découvrez avec nos experts les clés d’une communication réussie !

 

Conférenciers :
• Dr Patrick Ginies
Département Douleur, Psychosomatique, Maladie fonctionnelle CHU Montpellier.

• Dr Charles Micheau
Chirurgien-dentiste avec une activité exclusive en parodontologie et implantologie ainsi qu’une activité hospitalo-universitaire. Egalement membre de l’Association Dentaire Française (ADF).

• Valérie Durier
Journaliste et animatrice.

 

Découvrez dès maintenant le replay du second webinaire sur « Les clés du conseil patient » en cliquant ici.

 


 

Cette vidéo vous est proposée par le Laboratoire Johnson & Johnson Santé Beauté France.